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Adults-Only, Paris musées

activité de corsetière, l’effacement de son père, la passion pour sa sœur, la fascination de pour tante sont autant de lointains jalons qui concourent à modeler une personnalité atypique, secrète, gourmande et toutefois sanglée, sans déplaisir, par le goût de l’uniforme. A la recherche de son propre temps perdu, il étudie Proust pour en livrer une interprétation murée en elle-même, et comme rauque. La vulnérabilité des sentiments se cristallisera également par d’étranges effigies de non moins mythiques héros de son panthéon: Verlaine, Louis II de Bavière, Allen Ginsberg, Kant, Napoléon. Dans le même temps, les rites de l’enfance s’entrechoquent. Equilibriste et jongleur, Maître Jacques ou fillette au cerceau évoquent de façon troublante, d’un pinceau léger, les créatures surnaturelles figées dans une lumière blafarde comme autant de réminiscences mobiles. Richard Lindner parcourt Manhattan en « touriste » – selon ses propres termes, de East 70th Street à Harlem, de Wall Street à Central Park. Nourri de la publicité urbaine et du graphisme journalistique qui ont longtemps été son gagne-pain, il hante cabarets et music-halls, observe les foules métissées de Grand Central Station comme les     arrestations     au     commissariat     de     police,     croque   Kiss   entre      gangster      et      cover-girl      dans    les

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night-clubs de Madison Square Garden. Stimulé par l’énergie du bitume, il s’inspire autant des sex-shops de 42nd Street que des boutiques de lingerie exhibant des mannequins indiscrets. Une iconographie fétichiste décline dès 1960, en tons de Kodachrome, les atours de femmes fatales au parfum d’amazones. Le surmâle-archétype, moustachu, cravaté, chapeauté cependant en citoyen ordinaire, s’électrise au contact de « Vénus en vinyle », gainées en fourreaux, de cuissardes et en talons aiguilles, lacées dans d’étranges corsets en forme de prothèses cannibales, masquées d’un loup ou de Rimmel, harnachées d’un fouet ou d’une cravache. Dos à dos, ces couples-caricatures datés renvoient par la puissance démystificatrice et contemptrice à la légende de Sader Masoch ou au Journal d’une femme de chambre d’Octave Mirbeau. Maquillage et coiffure, blush et brushing, cagoule et panama, jarretière et bas résille, le corps féminin n’est jamais nu. Seulement pervers: la poitrine, opulente et provocatrice, de la maitresse menace autant qu’elle hypnotise. Fardé, couvert pour mieux se découvrir, aguichant, excessif, paré de collants ou de fuseaux, le galbe du venin d’Eve – l’as de cœur excite la proie de l’Adam moderniste l’as de trèfle.

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activité de corsetière, l’effacement de son père, la passion pour sa sœur, la fascination de pour tante sont autant de lointains jalons qui concourent à modeler une personnalité atypique, secrète, gourmande et toutefois sanglée, sans déplaisir, par le goût de l’uniforme. A la recherche de son propre temps perdu, il étudie Proust pour en livrer une interprétation murée en elle-même, et comme rauque. La vulnérabilité des sentiments se cristallisera également par d’étranges effigies de non moins mythiques héros de son panthéon: Verlaine, Louis II de Bavière, Allen Ginsberg, Kant, Napoléon. Dans le même temps, les rites de l’enfance s’entrechoquent. Equilibriste et jongleur, Maître Jacques ou fillette au cerceau évoquent de façon troublante, d’un pinceau léger, les créatures surnaturelles figées dans une lumière blafarde comme autant de réminiscences mobiles. Richard Lindner parcourt Manhattan en « touriste » – selon ses propres termes, de East 70th Street à Harlem, de Wall Street à Central Park. Nourri de la publicité urbaine et du graphisme journalistique qui ont longtemps été son gagne-pain, il hante cabarets et music-halls, observe les foules métissées de Grand Central Station comme les     arrestations     au     commissariat     de     police,     croque   Kiss   entre      gangster      et      cover-girl      dans    les

night-clubs de Madison Square Garden. Stimulé par l’énergie du bitume, il s’inspire autant des sex-shops de 42nd Street que des boutiques de lingerie exhibant des mannequins indiscrets. Une iconographie fétichiste décline dès 1960, en tons de Kodachrome, les atours de femmes fatales au parfum d’amazones. Le surmâle-archétype, moustachu, cravaté, chapeauté cependant en citoyen ordinaire, s’électrise au contact de « Vénus en vinyle », gainées en fourreaux, de cuissardes et en talons aiguilles, lacées dans d’étranges corsets en forme de prothèses cannibales, masquées d’un loup ou de Rimmel, harnachées d’un fouet ou d’une cravache. Dos à dos, ces couples-caricatures datés renvoient par la puissance démystificatrice et contemptrice à la légende de Sader Masoch ou au Journal d’une femme de chambre d’Octave Mirbeau. Maquillage et coiffure, blush et brushing, cagoule et panama, jarretière et bas résille, le corps féminin n’est jamais nu. Seulement pervers: la poitrine, opulente et provocatrice, de la maitresse menace autant qu’elle hypnotise. Fardé, couvert pour mieux se découvrir, aguichant, excessif, paré de collants ou de fuseaux, le galbe du venin d’Eve – l’as de cœur excite la proie de l’Adam moderniste l’as de trèfle.

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